Mémoire : « Le vén. Chapitre de l'église métropolitaine d'Embrun ou mieux la maison de chanonge de cette église possédoit, de tems immémoré, une forest appellée Coste-Male ou Male-Blache, dans le terroir de la parroisse de Saint-André-lès-Embrun, hameau de Séguret , comm'on peut le voir par l'acte de mise en possession en sa faveur par l'archevêque B.
Sic . En 1192, l'archevêque d'Embrun est Guillaume de Bénévent (1189-1202).
, en l'année 1192, raporté ou vidimé d'Hugues
Baloni , sacristain de l'église de Digne et vicaire général de l'archevêque d'Embrun, de l'année 1317. Cette mise en possession fut faite à cause que les consuls d'Embrun mettoient au ban cette forest et le terroir de Séguret, qui apartenoient à l'église d'Embrun, depuis le rif de
Coste Male jusques au rif des
Pals . Le chapitre d'Embrun, à la prière de plusieurs habitants de Saint-André et se promettant un revenu plus considérable que celuy du chaufage de sa maison de chanonge, pour lequel cette forest estoit destinée, l'a donné en emphithéose perpétuelle à plusieurs habitants dudit lieu, pour la défricher et y planter des vignes, aux clauses et conditions insérées dans cet acte emphithéotique du 8 novembre
1325, signé par Pons Valentin, notaire. Il est permis aux emphithéotes d'arracher les arbres, de défricher toute la forest et y planter des vignes, à leur dépens. Ce défrichement sera fait dans cinq années et les vignes, plantées. Si, dans ce terme, cette condition n'est pas remplie, le chapitre rentrera dans ses anciens droits. Les bois qui seront coupés ou arrachés ne pourront être transportés qu'après que les vignes auront étté plantées. Il n'en apartiendra aux emphithéotes que les souches ou racines, et le bois coupé apartiendra au chapitre. Les emphithéotes ou leurs successeurs passeront nouvelle reconnoissance quand ils en seront requis, et payeront au chapitre ou à sa maison de chanonge, pour la taisse et dixme, la cinquième partie des fruits qui se percevront dans ledit terrain, portable à la maison du chapitre au hameau de Séguret. Ils ne pourront vendre, aliéner, céder, etc. Lesdites vignes, sens le consentement exprès du chapitre. Celuy qui voudra vendre, aliéner, etc. Dénoncera le prix au chapitre, qui pourra retenir la pièce de terre ou de vigne qu'il veut vendre ; et si le chapitre veut, il pourra le vendre ou donner à qui bon luy semblera. Il sera mis, toute les années, un garde-vigne aux fraix des emphithéotes. Personne n'y pourra faire paître des agneaux et brebis, sous l'amande de 60 sols bons viennois au profit du chapitre. Si quelqu'un ne cultive pas bien sa vigne, il sera loisible au chapitre de l'en expulser et la donner à d'autres. Il ne sera point planté des noyers dans ces vignes, mais seulement des amandiers et pêchers ». Les emphytéotes sont au nombre de 23. L'acte de
1325 « a eu son effet, et les emphitéotes avoient planté des vignes dans cette forest et avoient déjà recueilli les fruits de leurs travaux en 1338, que l'archevêque B
Bertrand de Deaux , archevêque d'Embrun depuis le 5 septembre 1323 jusqu'au 18 décembre 1338, époque où il fut créé cardinal prêtre de Saint-Marc, puis (1350) cardinal évêque de Sabine, mort à Avignon le 24 octobre 1355.
demande au chapitre de luy payer les arrérages et la dixme courante, quant à la moitié, pour les fruits perçus dans le nouveau vignoble de
Male Blache . Le chapitre, voulant acheter la paix, céda à cet archevêque le droit des langues de bœuf que la maison de chanonge prenoit dans les boucheries d'Embrun et autres droits dans ladite ville. Au moyen de cette cession le chapitre a demeuré paisible possesseur dudit vignoble ». Dans le cadastre de Saint-André, « fait en l'an 1463 », les tenanciers sont ainsi chargés :
Item,... Tenet unam vineam in Blachia canoniae ... On n'a pas encore trouvé le regitre des emphitéoses, reçu par Mes David et Brunéty, notaires, du 17e janvier 1491,... Communiqué au procès de 1597 ». En 1519 et 1520, 1e chapitre donna «beaucoup de fonds à plusieurs particuliers de Sainct-André, sous la taisse de la huitième des fruits, pour ce qui regarde seulement le mas des
Talus , qui est au bas de la blache, près la rivière de Durance, attendu les deffenses qu'ils devoient faire contre les innondations de cette rivière ; mais, pour la partie supérieure, qui se trouve dans le terrain de la blache, les emphitéotes de ce tems là sont tenus à payer la septième des fruits, ainsi qu'on peut le voir dans les codets de Jaumari, notaire, ausdit ans, cottés, l'un de 4 P, l'autre de 4 Q
D'après l'Inventaire très sommaire du 16 novembre 1790 ( Archives des H.- A ., série Q, 51) le registre coté 4 P était de 1518, et le registre coté 4 Q, de 1520 (art. 159 et 160).
. Sur des contestations intervenues entre le chapitre et les habitants de Sainct-André, qui possèdent des fonds auprès de la blache de chanonge et qui payent la dixme au seigneur archevêque et autres seigneurs décimants à la cotte quatorzième pour le bled et à la vingtième pour le vin, il a été fait un bornage, le 22e aoust 1521, entre les députés de ladite église et les consuls de Saint-André, auquel acte se trouvèrent aussi les consuls d'Embrun. Il y est dict qu'il fut planté une limite... Au sommet ou areste de la blache et dans le lieu même où il s'en trouvoit déjà une ancienne ; on y mit trois gardes... La troisième garde, au cotté, vers Séguret, visant ou coupant en bas, vers la Durance, à une pierre sur laquelle les armes du chapitre sont sculptées... Le chapitre, veillant à la conservation des vignes de la blache, présente requêtte au parlement,.. Le 20e de juin 1531, pour obtenir des inhibitions et deffenses aux étrangers et aux habitants de Saint-André de mener paître leurs bestiaux et de couper des bois dans le restant de la blache, afin que ce reste de forest, ettant conservé, pût servir de barrière aux coulées de neige et à la grande quantité d'eau qui vient du sommet de cette blache, lors des grandes pluyes. Cette requêtte fut répondue d'un décret conforme et des lettres expédiées au nom de M. le comte de Saint-Paul, gouverneur de la province
François de Bourbon, gouverneur du Dauphiné depuis 1526 (Guy Allard, Dict. Du Dauph., I, 559).
. En cette même année, il y a eu plusieurs reconnoissances, ainsi qu'en la précédente et suivante, pour les fonds sis au mas des
Talus , au bas de la blache, et même pour une
béalière (canal) d'un moulin, qui est dans le même terrain, ainsi qu'on peut s'en édifier dans les divers actes qui sont au registre cotté de dix F, et autrefois X
Cf. Le n° 221 de l'Inventaire très sommaire du 16 novembre 1790.
, intitulé :
Recepta omnium jurium et emolumentorum domus canoniae Ebredunensis , et qui a été communiqué dans les procèz de 1527 et 1648, par le syndic du chapitre et par le sieur La Pérouze, baile de chanonge... Il y a plusieurs actes d'arrentement des taisses de la blache, passés par le chapitre, entr'autres il en est un du 5 aoust 1413 cotté six V
C'est le n° 187 de l'Inventaire cité ci-dessus.
, dans lequel il est dit que le chapitre donne en arrentement la cinquième des fruits ou raisins de la blache... Le syndic du chapitre, sur le refus des emphithéotes, a présenté requette au juge d'Embrun, le 20e de septembre 1597, pour avoir payement du courant et arrérages, à la cotte septième, des fruits des vignes de la blache de
Tallus … Le décret est conforme... Dès le lendemain de ce décret, 21 septembre 1597, le tout a été lu au prône de la messe parroissiale de Saint-André, suivant le certificat du sieur curé, et, à la sortie de cette messe, l'huissier l'a publiée au son de trompe ». D'où procès. « Le premier témoin, natif de Saint-André, habitant à Embrun, dit avoir vu, lors de la prise des fruits, que les particuliers, possédants vignes à la
Male Blache , portaient à la maison du chapitre, à Séguret, de sept charges de vendange une, de sept
massons de chanvre un, de sept raves une, de sept choux un... Noble Jérôme de Baile, sieur de Saint-Didier, dit avoir ouï dire à fû noble Antoine de Baile, son père, que ceux qui avoient du vin à la blache de Séguret ettoient en coutume de payer la dixme à raison de sept charges une... Honnora Guigues, fû André, dit qu'ettant rentier de la maison de chanonge pendant six ans, depuis 1576 jusques en 1582, il retiroit des sous-rentiers du mas appellé Male Blache 24 charges de bled et 16 écus d'or et un quart d'écu, lesquels sous-rentiers prenoient des particuliers dudit mas la septième partie des fruits ;... Dit encore qu'ettant allé voir ladite maison [de Séguret], il vit une grande limite, de la hauteur de sa personne, au-dessus du chemin, vers la montagne, partageant ledit terroir, sculptée des armoiries dud. Chapitre... Messire Jean Salva, curé de Saint-André, dit qu'il y a environ 22 ou 23 ans que fû Thomas Salva, son père, et son oncle Jean Salva, frères ettoient rentiers de fû M. Sigaud, chanoine et baile de chanonge », etc. Le 19 août 1648, Jean La Peyrouse, baile de chanonge, présente une requête pour « avoir payement dudit droit de la septième des fruits de Male Blache ».... « Jusques à aujourd'huy les tenanciers des vignes et autres fonds ont payé et payent ledit droit de taisse, non pas, il est vray, à la cotte septième,... Mais seulement à la neuvième : on n'a pas encor pû découvrir ce qui adonné lieu à cette reduction », 1764.